Victor Charlie Vietcong
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Victor Charlie Vietcong
Victor Charlie Vietcong.
de Kuno Knöbl. Éditions Flammarion 1967. 392 pages
Il est rare de lire à la suite deux ouvrages de grande qualité.
Après ma revue précédente du livre de Bernard Fall (1) je ne pensais pas tomber sur une autre perle du même genre.
Étonnamment, on pourrait même dire que l’ouvrage présenté ici est tout à fait complémentaire avec celui de Fall.
Comme de coutume maintenant commençons par l’auteur:
Comme Bernard Fall, Kuno Knöbl est Autrichien, mais lui, il le restera toute sa vie. Si l’on cherche des infos sur le personnage, on n’a pas grand chose à se mettre sous la dent : Né en 1936, mort en 2012... ou presque.
Knöbl fut très connu en Autriche comme producteur et directeur d’émissions télévisées à la chaîne nationale Autrichienne.
Son périple au Vietnam est tout juste mentionné dans ses hommages posthumes, ainsi qu’une traversée du Pacifique sur une Jonque Chinoise dont il a écrit le périple (2).
Pourtant, pourtant… pour une personne qui n’est pas un « spécialiste » de la guerre du Vietnam, je dois m’incliner bien bas et rendre hommage à cet auteur et à ce livre que je considère maintenant comme une référence.
Pourquoi ? Comme Bernard Fall, peut-être leur structure verbale germanique, leur permet à la fois d’analyser des faits et de les retranscrire avec clarté et virtuosité ? Il n’empêche que ce livre se lit particulièrement bien au regard du nombre d’informations qu’il contient.
Le titre pourrait nous faire supposer que l’auteur part sur un parti pris de centrer le conflit du point de vue Viêt-Cong ou Nord Vietnamien. Et bien non, même si le livre commence comme un roman policier lorsque l’auteur tente de rejoindre un groupe de maquisard en passant par le Laos, Knöbl passe d'un belligérant à l'autre sans aprioris.
L’auteur dresse presque toutes les facettes de la guerre en faisant ressortir toutes ses évolutions, ses enchaînements avec des exemples précis et parfois des anecdotes très instructives.
Son statut d’Autrichien lui permettra d’aller donc au contact des Viêt-Cong, au Nord Vietnam, et d’accompagner des soldats Américains. Il participe même à un raid sur la la légendaire piste Ho Chi Minh dans un chasseur Laotien (3).
Ces différents contacts lui permettent de faire presque le tour d’un sujet, et ainsi de mettre en confrontation les arguments des différentes partie en opposition. Ces reportages parfois contradictoires nous donnent une matière que j’ai peu rencontrée dans les livres sur cette guerre car il fait parler aussi bien le Général Moore, que le jeune commissaire politique d’un village en territoire tenue par les Viêt-Cong(4). Cela donne un livre très riche, foisonnant qui rentre tout à fait en résonance avec celui de Bernard Fall, car bien que moins argumenté sur les chiffres et les analyses, cette proximité, parfois dangereuse, avec les différents belligérants, nous emmène très profondément dans l’histoire de ce conflit.
Son chapitre sur « la guerre spéciale Américaine » est un des premiers exposé sur ce que beaucoup de « fan » de la guerre du Vietnam appel les FS, les Forces Spéciales. Il décrit les origines politiques qui poussent l’état major US à reconsidérer sa tactique militaire (5) et en 65 c'est assez nouveau et confidentiel.
D’ailleurs c’est en partie la célèbre bataille de Ap Bac du 2 janvier 1963 qui déclenche cette prise de conscience au sein de l’armée Américaine de la faiblesse de leur allier et la force de leur ennemie. Cette bataille décrite dans le chapitre « Le soulèvement qui devient une guerre » est minutieusement racontée, et pour cause, l’auteur est présent sur les lieux. On retrouvera cette même description faite depuis les airs par un avion de reconnaissance et de renseignement commandé par John Paul Vann dans le livre de Neil Sheehan (6), et le récit de Knöbl enrichi énormément celui ci.
On retrouve aussi Henri Hué (7) au détour d’une mission qui se fait canarder de belle façon. Une autre fois un sous officier sort très en colère d’une hutte dans un village Viêt-Cong qu’il vient de prendre. Il vient de découvrir au fond de celle ci un énorme stock d’aide alimentaire estampillée US ! Histoire qui lui servira à exposer le problème lié à la corruption Sud Vietnamienne.
Il y a aussi un chapitre que j’ai dévoré car c’est la première fois que je lisais quelque chose sur un sujet visiblement qui fut tabou dans l’histoire de cette guerre : Le F.U.R.L.O ! Mais c’est quoi le F.U.R.L.O ? C’est le Front Uni pour la Libération de la Race Opprimée ! Une mouvance politique qui à la fois combat le Viêt-Cong et les gouvernementaux, ce qui rend sa position extrêmement difficile. Mais ses partisans trouveront un allier de choix dans les Forces Spéciales qui préféraient un seul montagnard ( 8 ) à dix soldat sud-Vietnamiens.
Comme pour cet article, le livre est parsemé (de notes) qui précisent encore les propos de l’auteur en fin de livre. Je conseil de les lires car elles ne sont pas accessoires et révèlent le sérieux et la véracité des informations données.
On retrouve aussi en fin d’ouvrage des documents annexes comme le schéma de l’organisation du parti populaire révolutionnaire, ou les organismes de liaison entre le Nord Vietnam et le Viêt-Cong, et même les 14 conditions des États Unis pour des négociations de paix (1965) et les 4 conditions de Hanoï. On y trouve également la biographie de tous les chefs important du front de libération (F.N.L)
Merci Monsieur Knöbl pour ce témoignage, qui, j’en suis heureux, n’est pas parti avec vous dans l’autre monde et qui je l’espère, ne sera jamais oublié des historiens et des passionnées du Vietnam.
NOTES.
1 Vietnam, Dernières réflexions sur une guerre
2 Taïki, le voyage au pays d’où l’on ne revient pas. (Éd. Albin Michel 1975)
3 Escadrille 764 commandée par le Lt. Chanh
4 Dans le chapitre « Dans le no man’s land » l’auteur arrive à ce faire montrer la vie dans un village Viêt-Cong, où on lui montre les tunnels, les procédures d’alerte et les occupations des villageois(e)s.
5 Page 184 : « Le général Pearson, commandant la 1er Brigade de la 10e division aéroportée à Tuy Hoa, s’exprima plu simplement [.] en déclarant :
- Nous avons surestimé les Sud Vietnamiens. »
6 L'innocence perdue de Neil Sheehan.
7. J’étais photographe de guerre au Vietnam.
8 Montagnard, nom donné par les Français et reprit par les Américains, désignant la plupart du temps les nombreuses minorités ethniques au Vietnam, qui furent bien avant la guerre, mais plus encore pendant, persécutées et exterminées par les Vietnamiens qui voulaient les soumettre à leur gouvernance.
de Kuno Knöbl. Éditions Flammarion 1967. 392 pages
Il est rare de lire à la suite deux ouvrages de grande qualité.
Après ma revue précédente du livre de Bernard Fall (1) je ne pensais pas tomber sur une autre perle du même genre.
Étonnamment, on pourrait même dire que l’ouvrage présenté ici est tout à fait complémentaire avec celui de Fall.
Comme de coutume maintenant commençons par l’auteur:
Comme Bernard Fall, Kuno Knöbl est Autrichien, mais lui, il le restera toute sa vie. Si l’on cherche des infos sur le personnage, on n’a pas grand chose à se mettre sous la dent : Né en 1936, mort en 2012... ou presque.
Knöbl fut très connu en Autriche comme producteur et directeur d’émissions télévisées à la chaîne nationale Autrichienne.
Son périple au Vietnam est tout juste mentionné dans ses hommages posthumes, ainsi qu’une traversée du Pacifique sur une Jonque Chinoise dont il a écrit le périple (2).
Pourtant, pourtant… pour une personne qui n’est pas un « spécialiste » de la guerre du Vietnam, je dois m’incliner bien bas et rendre hommage à cet auteur et à ce livre que je considère maintenant comme une référence.
Pourquoi ? Comme Bernard Fall, peut-être leur structure verbale germanique, leur permet à la fois d’analyser des faits et de les retranscrire avec clarté et virtuosité ? Il n’empêche que ce livre se lit particulièrement bien au regard du nombre d’informations qu’il contient.
Le titre pourrait nous faire supposer que l’auteur part sur un parti pris de centrer le conflit du point de vue Viêt-Cong ou Nord Vietnamien. Et bien non, même si le livre commence comme un roman policier lorsque l’auteur tente de rejoindre un groupe de maquisard en passant par le Laos, Knöbl passe d'un belligérant à l'autre sans aprioris.
L’auteur dresse presque toutes les facettes de la guerre en faisant ressortir toutes ses évolutions, ses enchaînements avec des exemples précis et parfois des anecdotes très instructives.
Son statut d’Autrichien lui permettra d’aller donc au contact des Viêt-Cong, au Nord Vietnam, et d’accompagner des soldats Américains. Il participe même à un raid sur la la légendaire piste Ho Chi Minh dans un chasseur Laotien (3).
Ces différents contacts lui permettent de faire presque le tour d’un sujet, et ainsi de mettre en confrontation les arguments des différentes partie en opposition. Ces reportages parfois contradictoires nous donnent une matière que j’ai peu rencontrée dans les livres sur cette guerre car il fait parler aussi bien le Général Moore, que le jeune commissaire politique d’un village en territoire tenue par les Viêt-Cong(4). Cela donne un livre très riche, foisonnant qui rentre tout à fait en résonance avec celui de Bernard Fall, car bien que moins argumenté sur les chiffres et les analyses, cette proximité, parfois dangereuse, avec les différents belligérants, nous emmène très profondément dans l’histoire de ce conflit.
Son chapitre sur « la guerre spéciale Américaine » est un des premiers exposé sur ce que beaucoup de « fan » de la guerre du Vietnam appel les FS, les Forces Spéciales. Il décrit les origines politiques qui poussent l’état major US à reconsidérer sa tactique militaire (5) et en 65 c'est assez nouveau et confidentiel.
D’ailleurs c’est en partie la célèbre bataille de Ap Bac du 2 janvier 1963 qui déclenche cette prise de conscience au sein de l’armée Américaine de la faiblesse de leur allier et la force de leur ennemie. Cette bataille décrite dans le chapitre « Le soulèvement qui devient une guerre » est minutieusement racontée, et pour cause, l’auteur est présent sur les lieux. On retrouvera cette même description faite depuis les airs par un avion de reconnaissance et de renseignement commandé par John Paul Vann dans le livre de Neil Sheehan (6), et le récit de Knöbl enrichi énormément celui ci.
On retrouve aussi Henri Hué (7) au détour d’une mission qui se fait canarder de belle façon. Une autre fois un sous officier sort très en colère d’une hutte dans un village Viêt-Cong qu’il vient de prendre. Il vient de découvrir au fond de celle ci un énorme stock d’aide alimentaire estampillée US ! Histoire qui lui servira à exposer le problème lié à la corruption Sud Vietnamienne.
Il y a aussi un chapitre que j’ai dévoré car c’est la première fois que je lisais quelque chose sur un sujet visiblement qui fut tabou dans l’histoire de cette guerre : Le F.U.R.L.O ! Mais c’est quoi le F.U.R.L.O ? C’est le Front Uni pour la Libération de la Race Opprimée ! Une mouvance politique qui à la fois combat le Viêt-Cong et les gouvernementaux, ce qui rend sa position extrêmement difficile. Mais ses partisans trouveront un allier de choix dans les Forces Spéciales qui préféraient un seul montagnard ( 8 ) à dix soldat sud-Vietnamiens.
Comme pour cet article, le livre est parsemé (de notes) qui précisent encore les propos de l’auteur en fin de livre. Je conseil de les lires car elles ne sont pas accessoires et révèlent le sérieux et la véracité des informations données.
On retrouve aussi en fin d’ouvrage des documents annexes comme le schéma de l’organisation du parti populaire révolutionnaire, ou les organismes de liaison entre le Nord Vietnam et le Viêt-Cong, et même les 14 conditions des États Unis pour des négociations de paix (1965) et les 4 conditions de Hanoï. On y trouve également la biographie de tous les chefs important du front de libération (F.N.L)
Merci Monsieur Knöbl pour ce témoignage, qui, j’en suis heureux, n’est pas parti avec vous dans l’autre monde et qui je l’espère, ne sera jamais oublié des historiens et des passionnées du Vietnam.
NOTES.
1 Vietnam, Dernières réflexions sur une guerre
2 Taïki, le voyage au pays d’où l’on ne revient pas. (Éd. Albin Michel 1975)
3 Escadrille 764 commandée par le Lt. Chanh
4 Dans le chapitre « Dans le no man’s land » l’auteur arrive à ce faire montrer la vie dans un village Viêt-Cong, où on lui montre les tunnels, les procédures d’alerte et les occupations des villageois(e)s.
5 Page 184 : « Le général Pearson, commandant la 1er Brigade de la 10e division aéroportée à Tuy Hoa, s’exprima plu simplement [.] en déclarant :
- Nous avons surestimé les Sud Vietnamiens. »
6 L'innocence perdue de Neil Sheehan.
7. J’étais photographe de guerre au Vietnam.
8 Montagnard, nom donné par les Français et reprit par les Américains, désignant la plupart du temps les nombreuses minorités ethniques au Vietnam, qui furent bien avant la guerre, mais plus encore pendant, persécutées et exterminées par les Vietnamiens qui voulaient les soumettre à leur gouvernance.
Dernière édition par javel le Lun 11 Avr 2016 - 8:55, édité 1 fois
javel- Messages : 3243
Date d'inscription : 28/06/2013
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Re: Victor Charlie Vietcong
Merci et en effet pour la fiabilité des Yards ou montagnards c est indique dans plusieurs livres.
jeune chien fou- Messages : 1193
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Localisation : Loiret/Sologne
Re: Victor Charlie Vietcong
Pareil, MOOONSIEUR Anderson l'a dit aussi.
Et encore une fois,belle review et même pas eu besoin de PQ pour la lire ^^
Et encore une fois,belle review et même pas eu besoin de PQ pour la lire ^^
Re: Victor Charlie Vietcong
Monsieur Anderson n'a jamais parlé du FURLO si j'ai bonne mémoire. Le fait est bien sûr corroboré par nombre de récits, mais je n'avais jamais rien lu sur cette mouvance, ses origines et son impacte sur le conflit. On parle souvent des montagnards comme des hommes sûrs qui furent de très bons guerriers, mais leurs destins n'est pas très clair. Dans ce livre il est question d'une rébellion entre les Montagnards et leur chef Sud Vietnamien dans un camps de FS (Des soldats et sous officiers furent tués) sous les yeux des Advisors. Ceux ci prirent leurs défenses par la suite, mais ils durent néanmoins les livrer à la justice (expéditive) de Diem et de Ky. Un vrai dilemme pour l'encadrement US qui devait se plier aux ordonnances de Saïgon sans trahir leurs hommes.
Inversement, Saïgon n'avait aucune confiance envers les montagnards, mais devait laisser les FS bosser car leurs résultats étaient bien plus concluant que ceux des gouvernementaux, fidèles, mais souvent incompétents et démotivés.
À la pointe du triangle, les Vietcongs eux, redoutaient particulièrement les montagnards pour leurs connaissances du terrain où ils étaient bien plus à l'aise que le maquisard.
Inversement, Saïgon n'avait aucune confiance envers les montagnards, mais devait laisser les FS bosser car leurs résultats étaient bien plus concluant que ceux des gouvernementaux, fidèles, mais souvent incompétents et démotivés.
À la pointe du triangle, les Vietcongs eux, redoutaient particulièrement les montagnards pour leurs connaissances du terrain où ils étaient bien plus à l'aise que le maquisard.
javel- Messages : 3243
Date d'inscription : 28/06/2013
Age : 54
Localisation : Le maquis
Re: Victor Charlie Vietcong
+1, mais il a bien souligné la fiabilité des montagnards, comparée à l'inefficacité de l'ARVN.javel a écrit:Monsieur Anderson n'a jamais parlé du FURLO .
Je ne faisais que répondre à JCF mon tit Javel
Re: Victor Charlie Vietcong
CuiCui a écrit:+1, mais il a bien souligné la fiabilité des montagnards, comparée à l'inefficacité de l'ARVN.javel a écrit:Monsieur Anderson n'a jamais parlé du FURLO .
En effet, Anderson (Hanson dans le roman) a dans son groupe un montagnard, Mrs Minh je crois, à qui il vouait un grand respect.
javel- Messages : 3243
Date d'inscription : 28/06/2013
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Localisation : Le maquis
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