Paroles de Dien Bien Phu.
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Paroles de Dien Bien Phu.
Paroles de Dien Bien Phu. Les survivants témoignent.
De Pierre Journoud et Hugues Tertrais. Collection Texto. Éditions Tallandier. 404 pages.
Pour présenter ce livre, je reprend quelques lignes de la conclusion de se livre qui illustre le mieux les motivations des auteurs.
Cette édition au format poche n’est pas bien impressionnante lorsqu’on la prend dans les mains, mais lorsqu’on ouvre ses pages, on entre dans un tout autre format.
Les deux coauteurs sont des spécialistes de l’Indochine, et leur travail est précis, extrêmement documenté, complet (et même plus) mais par dessus tout, sa forme narrative le rend didactique et donc facile à lire.
Le concept appréciable de ce livre c’est d’avoir détaillé cette bataille en la ponctuant des témoignages, le plus souvent inédits, des anciens de Dien Bien Phu.
La force des témoignages nous concentre sur des points souvent oubliés, des anecdotes qui révèlent parfois un problème crucial, et des observations qui contredisent les versions officielles.
À propos des largages de vivre et de munitions :
Grâce à divers témoignages, ce livre nous donne une autre perspective qui dépassait de très loin le simple périmètre de la bataille.
Mais le plus important c’est d’avoir donné une voix aux rescapés, qui par bien des cotés, n’ont pas été entendu, et comme le souligne la fin du livre, furent presque effacées de notre histoire, comme des survivant gênant qui nous rappelait les séries noires qu’allaient vivre l’armée française pendant 20 ans.
C’est donc un hommage bien étayé qui prend la forme d’une narration historique. Les auteurs ne vont pas se contenter de se concentrer sur le cœur de la bataille, mais bien sûr sur son « avant » avec les atermoiements des politiques et les convictions obtuses des militaires. Puis après une minutieuse description de la bataille comparée souvent comme un second Verdun, Pierre Journoud et Hugues Tertrais nous exposent l’après : Les camps Vietminh et les tentatives d’endoctrinement et les privations sévères, mais aussi le retour après l’accord de Genève de 55. C’est cette partie qui m’a le plus affectée je crois.
Il y a déjà une forme d’injustice pour ces combattants, qu’il faut le rappeler se sont battus comme des lions et ont réussit à tenir tête à dix fois plus nombreux qu’eux, et qui sont au final vaincu, lâcher par un commandement qui n’a n’ose plus donner les moyens pour au moins un sauvetage offensif.
Vaincu, survivant d’une lourde bataille qui failli les écraser comme nombre de leur camarades, et puis qui pour beaucoup on failli connaître la mort dans les camps : Puis ils arrivent en France, enfin, voilà pour certain 2 ans qu’ils en rêvaient, et ils sont accueillis comme de pestiférés, aussi bien par la population que par leur hiérarchie militaire qui refuse de voir, ou bien qui voit tout à fait les fautes commises envers eux.
Ci dessous un extrait d’un débriefing lors du retour en France d’un soldat que je trouve bouleversant d’injustice:
Cette fin de livre est aussi assez révélatrice de la non acceptation de cette défaite, trop lourde, trop chargée de conséquences, qui rappel à d’anciens nostalgiques que l’empire s’écroula le 7 Mai 1954.
Pourtant, les leçons Politiques en furent tirées du cotés Français*, mais comme le font remarquer les survivants au regard de « la seconde guerre d’Indochine » Américaine, cette bataille outre Atlantique n’a servie que de propagande Anticommuniste, sans que jamais les autorités US ne se penchent vraiment sur les puissant ressorts politiques et l’engament de la population civile Vietnamienne qui furent une des clefs de la réussite du général Giap.
Un ancien qui retourna là bas raconte :
Sévère jugement, mais beaucoup racontent au travers de leur expérience du terrain, que « qu’ils n’avaient aucune chances. » et donc cette défaite Française, au lieu de servir de mètre étalon pour s’affranchir des erreurs passées, ne devint qu’un repère qu’il fallait absolument éviter comme l’avait très bien par la suite illustré l’épisode de la bataille de Khé Sanh, qui met en avant ce que l’on pourrait appeler le syndrome Dien Bien Phu dans le haut commandement US.
Encore une belle découverte donc que ce livre que je vous conseil même si vous avez lu déjà Jule Roy ou Bernard Fall** ou tout autre livre sur cette bataille.
Pour finir encore un extrait d’un témoignage assez étonnant (mais si prévisible) qui met en avant le manque de clairvoyance et l’arrogance du haut commandement Français envers ses propres troupes autochtone.
Le général Van Hinh raconte un échange avec le Général Navarre :
Information capitale qui nous coûta cher.
Epilogue
J’ai lu ce livre durant mon séjour au Japon (pas si loin de l’Indochine) et lors d’une ascension sur le mont Fuji: Durant une laborieuse marche, je me suis retrouvé à Dien Bien phu : L’air y étais humide, et vers 2000 mètres je me suis retrouver dans un épais brouillard. Je ruisselais d’eau, puis il s’est mis à pleuvoir. J’ai pensé à cette humidité, cette chaleur, puis ce froid des haut plateaux Vietnamiens. Comme pour donner corps à mes pensées, j’entendis des détonation les canons qui venaient du camp militaire de Fujiyoshida au pied de la montagne. On pouvait presque sentir le souffle de la résonance des exercices de tir, qui passait sur les marcheurs, comme des coups de tonnerre enveloppant la montagne.
Ces coups de canons m’ont accompagnés jusqu’à 3000 mètres, et je n’ai pas arrêté d’y penser, comme hypnotiser par une ambiance qui aurait pu être celle de Dien Bien Phu.
Peut-être durant cette période, comme dans une série fantastique, j’ai malgré moi fait un détour dans l’histoire pour en respirer un peu de vestiges de cette bataille.
* Durant la guerre d’Algérie, le haut commandement pressentait que faire pression sur la population allait considérablement affaiblir l’action armée. Mais le syndrome Bien Dien Phu allait provoquer aussi une guerre barbouzarde avec son cortège d’exactions appelé souvent action de renseignement, qui au final, eu les mêmes conséquences.
**Bernard Fall. Un coin d'Enfer.
De Pierre Journoud et Hugues Tertrais. Collection Texto. Éditions Tallandier. 404 pages.
Pour présenter ce livre, je reprend quelques lignes de la conclusion de se livre qui illustre le mieux les motivations des auteurs.
«[.] Ce livre n’avait pas l’ambition de réécrire l’histoire de la bataille de Dien Bien Phu, plutôt de donner la parole à ceux qui lui ont survécus, d’inventorier aussi ce qui se cache derrière le mythe- d’approcher enfin, à travers le témoignage, l’homme dans sa vérité.»
On peut dire que le travail a été réalisé brillamment par les deux auteurs qui nous livre une bataille comme je n’en avait jamais lue. Bien sûr la chronologie des faits, certains détails, et les grandes lignes ne changent guère des autres écrits sur ce sujet, mais le fond en est significativement changé."
Cette édition au format poche n’est pas bien impressionnante lorsqu’on la prend dans les mains, mais lorsqu’on ouvre ses pages, on entre dans un tout autre format.
Les deux coauteurs sont des spécialistes de l’Indochine, et leur travail est précis, extrêmement documenté, complet (et même plus) mais par dessus tout, sa forme narrative le rend didactique et donc facile à lire.
Le concept appréciable de ce livre c’est d’avoir détaillé cette bataille en la ponctuant des témoignages, le plus souvent inédits, des anciens de Dien Bien Phu.
La force des témoignages nous concentre sur des points souvent oubliés, des anecdotes qui révèlent parfois un problème crucial, et des observations qui contredisent les versions officielles.
À propos des largages de vivre et de munitions :
«Nous trouvâmes de nombreux systèmes d’ouverture sabotés de manière à ce que le colis s’écrase au sol. Très souvent, il s’agissait de colis dont le contenu nous étais vital [.] Nombre d’entre eux portaient des inscriptions telles que : « les ouvriers Français luttent également contre la sale guerre coloniale. »
Grâce à divers témoignages, ce livre nous donne une autre perspective qui dépassait de très loin le simple périmètre de la bataille.
Mais le plus important c’est d’avoir donné une voix aux rescapés, qui par bien des cotés, n’ont pas été entendu, et comme le souligne la fin du livre, furent presque effacées de notre histoire, comme des survivant gênant qui nous rappelait les séries noires qu’allaient vivre l’armée française pendant 20 ans.
C’est donc un hommage bien étayé qui prend la forme d’une narration historique. Les auteurs ne vont pas se contenter de se concentrer sur le cœur de la bataille, mais bien sûr sur son « avant » avec les atermoiements des politiques et les convictions obtuses des militaires. Puis après une minutieuse description de la bataille comparée souvent comme un second Verdun, Pierre Journoud et Hugues Tertrais nous exposent l’après : Les camps Vietminh et les tentatives d’endoctrinement et les privations sévères, mais aussi le retour après l’accord de Genève de 55. C’est cette partie qui m’a le plus affectée je crois.
Il y a déjà une forme d’injustice pour ces combattants, qu’il faut le rappeler se sont battus comme des lions et ont réussit à tenir tête à dix fois plus nombreux qu’eux, et qui sont au final vaincu, lâcher par un commandement qui n’a n’ose plus donner les moyens pour au moins un sauvetage offensif.
Vaincu, survivant d’une lourde bataille qui failli les écraser comme nombre de leur camarades, et puis qui pour beaucoup on failli connaître la mort dans les camps : Puis ils arrivent en France, enfin, voilà pour certain 2 ans qu’ils en rêvaient, et ils sont accueillis comme de pestiférés, aussi bien par la population que par leur hiérarchie militaire qui refuse de voir, ou bien qui voit tout à fait les fautes commises envers eux.
Ci dessous un extrait d’un débriefing lors du retour en France d’un soldat que je trouve bouleversant d’injustice:
« De notre entretien, le lieutenant conclut : « De toute façons, si tu avais fait du bon boulot, tu ne serais pas là aujourd’hui ! » J’étais sergent chef, médaillé militaire à titre exceptionnel, et d’après cet officier, je n’avais pas fait mon boulot ? Je n’ai pu encaisser cette remarque ; 50 ans après, elle me reste encore en travers de la gorge. »
Cette fin de livre est aussi assez révélatrice de la non acceptation de cette défaite, trop lourde, trop chargée de conséquences, qui rappel à d’anciens nostalgiques que l’empire s’écroula le 7 Mai 1954.
Pourtant, les leçons Politiques en furent tirées du cotés Français*, mais comme le font remarquer les survivants au regard de « la seconde guerre d’Indochine » Américaine, cette bataille outre Atlantique n’a servie que de propagande Anticommuniste, sans que jamais les autorités US ne se penchent vraiment sur les puissant ressorts politiques et l’engament de la population civile Vietnamienne qui furent une des clefs de la réussite du général Giap.
Un ancien qui retourna là bas raconte :
« On a accueilli l’engagement américain, dans un premier temps avec un certain scepticisme puis, dans un second avec de l’agacement. Parce que les Vietnamiens allaient encore être les victimes d’une guerre. Les Américains se sont laissés prendre au piège en voulant régler le problème avec des machines, les hélicoptères en particulier. Sauf exceptions, ils n’avaient pas suffisamment de liens avec les populations, ni d’estime pour les gens [.] ils étaient méprisés, parce que les Vietnamiens ne les trouvaient pas très subtils, ou parce qu’ils faisaient des erreurs psychologique formidables, comme le fait d’utiliser des Coréens dans la baie de Cam Ranh…En plus, l’armée américaine s’est laissée corrompre, notamment par la drogue»
Sévère jugement, mais beaucoup racontent au travers de leur expérience du terrain, que « qu’ils n’avaient aucune chances. » et donc cette défaite Française, au lieu de servir de mètre étalon pour s’affranchir des erreurs passées, ne devint qu’un repère qu’il fallait absolument éviter comme l’avait très bien par la suite illustré l’épisode de la bataille de Khé Sanh, qui met en avant ce que l’on pourrait appeler le syndrome Dien Bien Phu dans le haut commandement US.
Encore une belle découverte donc que ce livre que je vous conseil même si vous avez lu déjà Jule Roy ou Bernard Fall** ou tout autre livre sur cette bataille.
Pour finir encore un extrait d’un témoignage assez étonnant (mais si prévisible) qui met en avant le manque de clairvoyance et l’arrogance du haut commandement Français envers ses propres troupes autochtone.
Le général Van Hinh raconte un échange avec le Général Navarre :
« [.]Et quant je vins lui dire que les Viets mobilisaient dans tout le pays des gens dès l’âge de quinze ans, il me répliquait que notre service de renseignement n’était pas aussi organisé que le sien, celui du corps expéditionnaire. Alors je lui disais que c’était, certes, les Français qui payaient les services de renseignement de l’armée Nationale Vietnamienne, mais que c’était à moi que les Vietnamiens donnaient les renseignements, parce que j’étais Vietnamien comme eux.
Mais l’on ne me croyait pas. J’avais pourtant prévenu qu’une quarantaine de canons de 105 mm arrivaient de Chine à Bien Dien Phu. »
Information capitale qui nous coûta cher.
Epilogue
J’ai lu ce livre durant mon séjour au Japon (pas si loin de l’Indochine) et lors d’une ascension sur le mont Fuji: Durant une laborieuse marche, je me suis retrouvé à Dien Bien phu : L’air y étais humide, et vers 2000 mètres je me suis retrouver dans un épais brouillard. Je ruisselais d’eau, puis il s’est mis à pleuvoir. J’ai pensé à cette humidité, cette chaleur, puis ce froid des haut plateaux Vietnamiens. Comme pour donner corps à mes pensées, j’entendis des détonation les canons qui venaient du camp militaire de Fujiyoshida au pied de la montagne. On pouvait presque sentir le souffle de la résonance des exercices de tir, qui passait sur les marcheurs, comme des coups de tonnerre enveloppant la montagne.
Ces coups de canons m’ont accompagnés jusqu’à 3000 mètres, et je n’ai pas arrêté d’y penser, comme hypnotiser par une ambiance qui aurait pu être celle de Dien Bien Phu.
Peut-être durant cette période, comme dans une série fantastique, j’ai malgré moi fait un détour dans l’histoire pour en respirer un peu de vestiges de cette bataille.
* Durant la guerre d’Algérie, le haut commandement pressentait que faire pression sur la population allait considérablement affaiblir l’action armée. Mais le syndrome Bien Dien Phu allait provoquer aussi une guerre barbouzarde avec son cortège d’exactions appelé souvent action de renseignement, qui au final, eu les mêmes conséquences.
**Bernard Fall. Un coin d'Enfer.
Dernière édition par javel le Lun 16 Jan 2017 - 8:45, édité 4 fois
javel- Messages : 3241
Date d'inscription : 28/06/2013
Age : 54
Localisation : Le maquis
Re: Paroles de Dien Bien Phu.
Je vais chercher des Kleenex et pas pour m'en servir comme PQ cette fois ci ^^
Encore une fois tu t'es surpassé.
Encore une fois tu t'es surpassé.
Re: Paroles de Dien Bien Phu.
Merci mon javel pour cette review
Amicalement lt john rinney
Amicalement lt john rinney
LT John Rinney- Messages : 1236
Date d'inscription : 12/02/2011
Localisation : Forest of Assassins
Re: Paroles de Dien Bien Phu.
Très chouette review, comme toujours. Tu m'as ému avec ton ascension du Fuji !
Puff- Messages : 2402
Date d'inscription : 13/05/2012
Re: Paroles de Dien Bien Phu.
Merci fidèles lecteurs!
Le prochain sera aussi très bon, pour mon plaisir, et pour le votre.
Le prochain sera aussi très bon, pour mon plaisir, et pour le votre.
javel- Messages : 3241
Date d'inscription : 28/06/2013
Age : 54
Localisation : Le maquis
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